Orateur(s)
Sophie Trachte Chargée de Cours (Faculté d'Architecture, ULiège)
Sara Boxus Design Project Manager (Wallonie Design)
Pauline Potgens Chargée de Projets (Eklo)

Économie circulaire dans la construction et valorisation des flux résiduels en entreprises

    Résumé

    La rencontre d’aujourd’hui s’inscrivait dans le cadre de la première quinzaine de l’économie circulaire organisée par Circular Wallonia. Le focus était mis sur l’économie circulaire dans le secteur de la construction parce qu’il représente un secteur-clé pour impulser un changement de paradigme car il utilise quantité de ressources naturelles et produit presque la même quantité de déchets.

    Sophie Trachte, chargée de cours à la Faculté d'Architecture de l’ULiège, a introduit la rencontre en expliquant qu’il fallait changer notre conception architecturale et donc la manière dont nous pensons et façonnons les bâtiments. Il s’agit de passer d’une conception linéaire à une conception circulaire.

    Outre la conception, il est également important de penser à la façon de choisir et de mettre en œuvre les matériaux et les éléments de construction.

    Elle souligne que notre conception architecturale, tout comme notre économie est encore trop linéaire. Nous répondons, de façon générale, à des besoins temporaires avec des solutions matérielles et techniques qui ont une longue durée de vie, ce qui entraine un gaspillage important des ressources investies.

    Se pose donc la question de savoir comment repenser notre conception architecturale pour la rendre plus durable, circulaire et réversible.

    Selon Sophie Trachte, le premier pas est de changer notre regard sur les déchets et de les considérer comme des ressources. Cette approche globale passe par une série d’actions allant de la prévention au choix de matériaux durables, en passant par le recyclage et la réutilisation.

    Au niveau environnemental, la conception circulaire permet de réduire les gaz à effet de serre et s’inscrit dans une directive-cadre européenne sur les déchets dont les priorités d’action sont reprises dans l’échelle de Lansink qui privilégie la prévention avant tout.

    L’économie circulaire a de nombreuses prémices mais 4 grands concepts nous inspirent aujourd’hui : l’écologie industrielle (exemple des entreprises Prayon & Knauf), le cradle to cradle (waste = food), l’urban mining (les villes et les bâtiments sont une source de matériaux réutilisables) & le design for change (on ajoute une 4ème dimension, le temps).

    Il existe de nombreuses définitions de l’économie circulaire. Dans le secteur de la construction on privilégie la définition du Centre Scientifique et Technique de la Construction (CSTC) selon laquelle l’économie circulaire est un modèle économique global dans lequel les ressources sont conservées en usage aussi longtemps que possible, dont on extrait le maximum de valeur pendant leur utilisation et dont on récupère et réemploie les produits et les matériaux à la fin de chaque cycle de vie en service.

    Les principes de la conception/construction circulaire passent par une réflexion en 3 échelles, sur lesquelles on va pouvoir agir de façon différente et complémentaire :

    • L’échelle du bâtiment : il s’agit de concevoir pour rendre adaptable et flexible afin de prolonger la durée de vie fonctionnelle et économique du bâtiment.

    Pour cela, on travaille sur 3 grands choix stratégiques en termes de conception : l’implantation, la polyvalence, la stratification.

    • L’échelle du composant : il s’agit de concevoir pour rendre démontable et réutilisable pour favoriser une récupération sans dommage des éléments.

    On choisit des systèmes constructifs et des matériaux en combinant plusieurs qualités techniques. Les 3 grands principes en termes de conception sont la durabilité, la réversibilité, la compatibilité.

    • L’échelle du matériau, fondamentale pour changer de paradigme au niveau du secteur, consiste à concevoir par et pour le réemploi au lieu d’utiliser des matériaux neufs. Selon le principe de l’urban mining, on capitalise et on exploite le stock bâti existant et le gisement de matières existant. Ici, les 3 étapes stratégiques sont préserver/maintenir, inventorier/réemployer, gérer et valoriser.

    En conclusion, Sophie Trachte a présenté un schéma qui reprend les éléments-clés d’une architecture circulaire et renseigné quelques ouvrages en la matière.

    Sara Boxus, design project manager chez Wallonie Design et Pauline Pötgens, consultante chez Eklo, ont ensuite présenté le projet Interreg Wanderful Stream, dont la particularité est d’accompagner et de guider gratuitement les PME dans leur transition vers une économie plus circulaire, via la valorisation de leurs flux résiduels en nouveaux produits ou services circulaires.

    Grâce à la mise en place d’une dynamique multidisciplinaire alliant technique, développement commercial et design, le projet a pour objectif de créer 40 prototypes ou POC de produits ou services circulaires issus de la valorisation de déchets d’entreprises et de concevoir une méthodologie de recherche et développement basée sur l’interdisciplinarité et l’approche STEAM (Sciences, Technologie, Engineering, Art et Mathématiques).

    Les 3 grandes étapes du projet sont les suivantes :

    • le mapping : identification de PME, des flux de déchets, des besoins et des challenges ;
    • le bootcamp : 3 jours pour passer du challenge au concept, avec des étudiants qui travaillent sur les problématiques des PME sélectionnées ;
    • les parcours d’innovation : 10 mois à un an pour une phase de recherche et d’analyse en vue de passer du concept au prototype.

    Elles ont ensuite donné quelques exemples concrets d’accompagnement, dans le cadre du projet, dans le domaine de la construction (Ahlstrom Munskjö, Diresco, Carmans).

    A l’approche de la fin du projet, des premiers constats positifs peuvent être faits : le décloisonnement et la pluridisciplinarité apportent une valeur ajoutée face aux challenges liés aux projets d’économie circulaire ; la coopération entre les entreprises et les différents secteurs et leurs chaines de valeur ouvre le champs des possibles. Une contrainte a été le focus sur la boucle recyclage car le besoin de travailler le plus en amont possible est essentiel.

    Retrouvez ci-dessous les slides de la présentation :

    L’économie circulaire repose sur plusieurs principes permettant de boucler des cycles de matières et d’éviter ainsi l’extraction, le transport et la transformation de nouvelles matières premières ainsi que les impacts qui y sont liés. Aussi, de nouveaux modèles économiques davantage axés sur le partage et la mutualisation peuvent être envisagés pour soutenir cette approche circulaire.

    La construction est un secteur-clé pour impulser un changement de paradigme car il utilise quantité de ressources naturelles et produit presque la même quantité de déchets. La mise en place d’une approche circulaire le plus en amont possible et dès la conception des projets serait une solution, comme Sophie Trachte nous l’expliquera.

    Pour tirer parti de la matière dans un cycle de vie étendu, créer des collaborations interdisciplinaires s’avère une clé de succès. 

    Le projet Interreg Wanderful.stream, qui a pour ambition de soutenir cette approche circulaire en valorisant des flux résiduels de PME en nouveaux produits ou matériaux circulaires, sera présenté pour illustrer des collaborations fructueuses entre des experts techniques, des designers et des consultants en développement économique afin d’accompagner l’entreprise dans la concrétisation de son projet circulaire.

    Après un bref rappel des principes et enjeux de l’économie circulaire, cette rencontre-conférence sera l’occasion de découvrir, au travers d’exemples concrets, dans le secteur de la construction notamment, comment des PME peuvent être accompagnées et guidées dans leur transition vers une économie plus circulaire.

    Dans le cadre de la première édition de la Quinzaine de l’économie circulaire organisée par Circular Wallonia.