Orateur(s)
Jean-Marc Lambotte Coordinateur Scientifique (Faculté des Sciences, Lepur, Sphères, ULiège)
Eric Vidal Coordinateur de Projets (Spi)
Maryse Degraen Référent Transition & Circularité (Spi)

Urbanisme circulaire : comment aménager durablement le territoire

    Résumé

    Le territoire et la circularité étaient au cœur des interventions aujourd’hui.

    Jean-Marc Lambotte, coordinateur scientifique au Centre de recherche sur la Ville, le Territoire et le Milieu rural (Lepur, ULiège), a introduit cette rencontre en posant quelques éléments de contexte, dont la volonté européenne d’atteindre, d'ici 2050, le No net land take ou Zéro artificialisation net. Cet objectif s’inscrit dans d’autres objectifs méta consistant, notamment, à réduire les émissions de gaz à effet de serre, découpler la croissance économique de l’utilisation des ressources et protéger la biodiversité.

    En Wallonie, la volonté du Gouvernement wallon de freiner l’étalement urbain et même d’y mettre fin à l’horizon 2050 implique de maintenir, réutiliser ou rénover le bâti existant ; de préserver au maximum les surfaces agricoles ; de réduire la consommation des terres non artificialisées et de localiser au maximum les bâtiments dans les tissus bâtis existants. Tout cela en faisant face, néanmoins, aux perspectives démographiques en hausse.

    Il a ensuite partagé quelques données de références sur le land take en Wallonie. Retenons que la fonction résidentielle constitue les 2/3 des terrains artificialisés.

    L’objectif à 2050 d’arriver à ce que 100% de nos besoins soient assouvis au travers d’une opération de recyclage urbain peut prendre diverses formes : modification d’immeubles existants, nouvelles constructions sur des terrains déjà artificialisés, démolition et reconstruction.

    Aussi, un suivi de toutes les formes de recyclage urbain dans la production de logements étant nécessaire pour que les autorités régionales et locales puissent monitorer les efforts, Jean-Marc Lambotte a partagé la méthodologie de monitoring de la part du recyclage urbain dans la production de logements.

    A l’échelle régionale, on remarque une répartition non homogène. La part très basse du recyclage urbain dans la production nette de logement dans certaines parties de la Wallonie s’explique par la disponibilité foncière encore immense au regard des besoins liés à la démographie (chiffres de 2016).

    Jean-Marie Lambotte a ensuite mis le focus sur le potentiel pouvant servir au recyclage. Le stock bâti résidentiel existant est le principal potentiel à activer dans l’ensemble du territoire, d’autant qu’en Wallonie 61% de l’urbanisation, hors voiries, est occupé par le résidentiel.

    Pour activer le stock bâti résidentiel afin de produire du logement sans consommer de terrain vierge, 4 modes principaux peuvent être envisagés :

    •  la démolition-reconstruction ;
    • la division de logements unifamiliaux en appartements ;
    • l’extension horizontale ou verticale d’un immeuble résidentiel existant ;
    • la construction neuve de petits logements sur des parties non bâties de vastes parcelles (bimby – building in my backyard).

    Le Lepur a, entre 2013 et 2015, procédé à l’actualisation de l’inventaire des sites à réaménager (SAR) de la RW. Ce dernier, actualisé en permanence, est réparti en 8 tables attributaires et 134 variables et consultable via internet (intéressant pour les promoteurs).

    La politique des SAR, menée par la RW depuis 50 ans, représente des budgets conséquents mais est toujours fort axée sur le curatif et moins sur le préventif.

    Précisions que cet inventaire est un inventaire des SAR de fait. Il faut faire la distinction avec les SAR de droit qui ont fait l’objet d’un arrêté du GW de reconnaissance via la procédure prévue par le CODT.

    L’intervention de Jean-Marie Lambotte s’est conclue sur le double intérêt de la reconnaissance comme SAR de droit, offrant la possibilité pour la sphère privée de s’associer à la sphère publique sous différentes formes en vue de réaménager certains sites.

    Maryse Degraen, Référent Transition & Circularité (Spi), a ensuite présenté brièvement les services et métiers de Spi avant d’aborder l’immobilier circulaire et de rappeler que l’objectif de la circularité est de consommer le moins de ressources possibles.

    Concernant l’approche publique immobilière, on est face à 3 échelles :

    • le territoire global (région, province, commune…) ;
    • le site (et son intégration directe dans son environnement) ;
    • l’infrastructure (construction, voirie, etc.) avec les volets éco-conception, réemploi, déconstruction, low tech, ...

    Le concept d’aménagement circulaire du territoire est assez récent (vs l’urbanisme linéaire) et recouvre beaucoup de notions, dont celle d’envisager le sol comme une ressource à préserver et à utiliser de manière frugale. Ses principes sont les suivants : intensifier les usages (avoir plusieurs fonctions et répondre à plusieurs besoins), réutiliser et transformer l’existant, densifier plutôt que s’étaler, recycler les espaces délaissés (friches), renaturer les espaces, optimiser et mutualiser les flux (matières, énergie, mobilité...).

    Les enjeux pour le territoire sont importants et de trois ordres : environnemental, social et économique. Quelques éléments de contexte en 2023 ont été cités : grand besoin en logements, parcs économiques quasi sold-out, certaines activités économiques ne peuvent pas être placées dans les friches.... il y aura toujours un grignotage de terrains.

    Maryse Degraen a ensuite expliqué comment on choisit ou non d’investir un lieu. Citons, entre autres, les éléments d’aide à la décision suivants : les études de friches SORASI ; la classification de Bernadette Mérenne-Schoumaker de l’Université de Liège qui définit quatre grands types de friches selon deux dimensions : les nuisances et le potentiel ; l’outil GRO qui permet de définir l’ambition durable sur un site ou une construction.

    Elle a conclu sa présentation en illustrant, au travers du projet des Ateliers Centraux à Ougrée-Seraing, les principes de vente conditionnelle / d’appel à promotion de sites grâce auxquels Spi prépare et facilite la mise sur le marché d’un site, en veillant à ce que le projet proposé par le(s) promoteur(s) corresponde à un besoin du territoire.

    Enfin, Eric Vidal,  Coordinateur de Projets chez Spi, a présenté des projets réalisés ou en cours : les Ateliers Centraux à Seraing, la réhabilitation de l’ancien charbonnage du Hasard à Cheratte, le Val Benoît, Flémalle Neuve et le site ACEC à Herstal. Dans tous ces projets, on retrouve une forte volonté de mixité des espaces et des fonctions. Spi n’est pas toujours l’unique propriétaire du terrain et peut alors jouer, dans ce cas, le rôle d’ensemblier (ou de coordinateur).

    Eric Vidal a approfondi le cas du site ACEC dont la reconversion a commencé et qui a permis de développé un guide « greenlife » (le pendant du master plan urbanistique pour les aspects de durabilité). Ce nouvel outil de communication permet de définir les ambitions de durabilité et de circularité d’un projet mais aussi de partager des exemples inspirants et une grille d’auto-évaluation. La conférence s’est terminée sur le rappel des principes de l’urbanisme circulaire que la projet ACEC a prévu d’intégrer. 

    Retrouvez ci-dessous les présentations de la rencontre :
    Urbanisme circulaire : comment aménager durablement le territoire from LIEGE CREATIVE

    Le territoire est à la fois notre lieu de vie et une ressource précieuse.

    Comment dépasser la tension entre les besoins multiples et évolutifs de notre société et la volonté de préserver les espaces et leur biodiversité ?

    Depuis 2011, l'Union européenne pousse ses états membres et les territoires qui les composent à atteindre d'ici 2050 l'objectif du No net land take ou Zéro artificialisation net. Cet objectif implique de parvenir à réduire drastiquement l'urbanisation nouvelle (toujours supérieure à 1.000 ha/an en Wallonie actuellement) de sorte que les quelques ha qui seront nouvellement consommés encore à cette échéance, chaque année, pourront être compensés par de la désartificialisation (donc par la restitution à la nature ou à l'agriculture de terres jadis artificialisées).

    Jean-Marc Lambotte, coordinateur scientifique au Centre de recherche sur la Ville, le Territoire et le Milieu rural (LEPUR), brossera l'ampleur des défis qui nous attendent en Wallonie et dressera diverses pistes de solutions.

    En tant qu’agence de développement, Spi pratique l’urbanisme circulaire en recyclant des lieux délaissés, en transformant des infrastructures existantes et en intensifiant l’usage de certains espaces et bâtiments. Elle illustrera sa pratique, au départ de projets réalisés ou en cours, dans les aspects d’aménagement du territoire ainsi que de gestion des sols et des terres.

    Cette rencontre-conférence mettra en évidence comment le recyclage urbain et l’urbanisme circulaire peuvent nous permettre de répondre à nos besoins en logements et activités économiques, tout en préservant notre territoire de façon durable.