Orateur(s)
Pierre Duysinx Professeur Ordinaire (Ingénierie des Véhicules, ULiège)
Dimitra Papadimitriou Assistante (Faculté des Sciences Appliquées, Ingénierie des Véhicules, ULiège)
Jérôme De Cooman Assistant-Doctorant (EU Law, (big) data, Artificial Intelligence Applications, Liège Competition and Innovation Institute, Faculté de Droit, ULiège)
Vincent Pécasse Head of Marketing & Customers Solutions (Ethias)
Pierre Courbe Chargé de Mission Mobilité (Inter-Environnement Wallonie asbl)
Dario Deserranno CEO (Ush - autonomous mobility provider)

La conduite autonome et la mobilité en tant que service. Les défis de l’industrie automobile

En collaboration avec les partenaires du Projet Pôle Automobile Européen
    Résumé

    Nous nous penchions hier soir sur la mobilité du futur, afin de rendre compte des conclusions du Livre blanc intitulé « Future move » est désormais disponible ici auquel a contribué l’Université de Liège, dans le cadre du projet PAE (Pôle Automobile Européen).

    Dressant une vue générale et stratégique sur l’avenir de la mobilité, cette étude se conclut sur des recommandations aussi bien adressées aux industries du secteur que, plus largement, à la société civile afin d’entamer le virage nécessaire pour être acteurs des (r)évolutions en route en matière de mobilité !

    Notre rencontre-conférence, première d’une série d’autres rendez-vous qui seront organisés dans le cadre du projet PAE, fut centrée sur la voiture autonome, l’une des pièces du puzzle de la mobilité de demain, sujette à de nombreux enjeux, questions et implications.

    Ainsi, avions-nous réuni, autour du Professeur Pierre Duysinx (Professeur Ordinaire - Ingénierie des Véhicules, ULiège) et Dimitra Papadimitriou (Assistante - Faculté des Sciences Appliquées) un panel d’intervenants pouvant apporter un éclairage complémentaire sur la voiture autonome.

    Pierre Duysinx a ouvert la séance en parcourant les grandes lignes de force du livre blanc, tout en plaçant cette étude dans le contexte des méga tendances qui caractérisent notre époque (digitalisation, changement climatique, I.A, congestion du trafic…). À ces forces motrices de changement est venue évidemment s’ajouter la crise Covid qui a eu de nombreux effets observables sur la mobilité. La tendance à la micro-mobilité avec la montée en puissance du vélo électrique est un exemple d’impact de la crise sanitaire, qui a eu pour effet de favoriser les déplacements individuels. De façon générale, la crise Covid a modifié notre conception de la mobilité pour qu’elle soit plus saine et plus flexible (individualisée).

    Il a ensuite également évoqué deux autres axes majeurs de conclusion de l’étude : l’accélération du développement du véhicule électrique et les évolutions du transport marchandises avec l’avènement de camions électriques, au gaz ou à l’hydrogène.

    Pour introduire la suite des réflexions du panel axé sur la voiture autonome, le Professeur Duysinx a souligné qu’en matière de conduite autonome, les principaux défis n’étaient pas que d’ordre technologique. Et qu’une implémentation réussie de ce nouveau mode de transport nécessitera une collaboration accrue entre tous les partenaires (gouvernement, industrie).

    Cela aura été répété à plusieurs reprises au cours de la soirée : l’avènement de la voiture autonome concerne tout un écosystème qui inclut évidemment l’infrastructure des villes.

    Pour conclure, le Professeur Duysinx a livré « son acte de foi » : il faut que tous les acteurs, économiques et privés s’associent pour aider l’industrie à pivoter vers l’entreprise 4.0 dans le secteur automobile. La 4ème révolution est en cours et il faut que les entreprises y adhèrent pour compter demain. Le champ est également ouvert pour le développement de nouvelles start-ups autour des nouveaux business générés par la révolution en cours dans la mobilité.

    Les membres du panel qui sont intervenus par la suite ont tous abondé en ce sens.

    Dario Deserranno, CEO de la start-up Ush qui accompagne les opérateurs dans le développement de projets de systèmes autonomes, a fait un état des lieux du marché qui se traduit plutôt par une certaine prudence.

    On voit principalement émerger de petits projets pilotes. Il faut dire que le contexte n’est pas encore très incitatif en la matière, les principaux freins étant :

    • d’ordre financier (coût élevé) ;
    • d’ordre législatif (avec notamment le fait que le législateur impose toujours un opérateur à bord) ;
    • d’ordre technologique (les navettes étant encore d’un niveau de maturité faible).

    Et de conclure en plaidant pour une conscientisation aux besoins pour lesquels le véhicule autonome peut apporter une solution appropriée (comme pour le transport de biens, ou dans les aéroports…)

    Rebondissant sur les aspects juridiques, Jérome de Cooman, Assistant-Doctorant en Faculté de Droit, s’est ensuite exprimé en pointant différents articles qui, sans avoir donné lieu à des évolutions récentes, font toujours référence en termes de mobilité.

    Évoquant lui aussi le fameux article 8 du code de la route qui stipule que « Tout véhicule ou train de véhicules en mouvement doit avoir un conducteur ».
    Ce qui, par nature, met déjà à mal le principe même de la voiture autonome.

    Soulevant différents aspects juridiques qui impactent la voiture autonome ou, à l’inverse, des principes juridiques que le développement de la voiture autonome « bouscule », il a notamment évoqué :

    • le problème d’uniformisation en la matière au niveau européen ;
    • le risk assessment ;
    • la problématique prégnante des données personnelles qui convoquent aussi bien la GDPR que l’e-privacy, la « data minimisation » et la « data anonymisation » ;
    • la question de la cyber sécurité ;
    • la régulation « safety by design » ;

    On l’a compris, la voiture autonome questionne le législateur et les questions restent nombreuses tandis que celui-ci semble plutôt suivre l’innovation que l’anticiper !

    Le débat serait d’ailleurs transposable à celui du brevet. Ne ralentirait-il pas l’innovation ?

    Dans la continuité de ces considérations juridiques, la parole a été donnée à « l’assureur » dont le métier se voit considérablement challengé par ces (r)évolutions en cours. Avant de transformer l’assurance automobile, il faudra clarifier les nombreuses questions informatiques et éthiques auxquelles les assureurs sont confrontés.

    Vincent Pécasse, Head of Marketing & Customers Solutions chez Ethias a partagé son point de vue en mettant plus particulièrement l’accent sur deux aspects :

    • le changement de paradigme de la « responsabilité » ;
    • les opportunités de développer de nouveaux business et services.

    À propos de la question épineuse de la responsabilité, celle-ci se décline en de multiples facettes. Qui sera responsable en cas d'accident avec une voiture autonome ? S’il n’y a plus de « conducteur » mais un « utilisateur », l'utilisateur sera-t-il responsable ? Ou sera-ce le constructeur ? Ou encore la société informatique qui a fourni la technologie ?

    Pour apporter des éléments de réponse à ce débat, Vincent Pécasse a rappelé les mots-clés qui priment aujourd’hui au niveau du cadre législatif.

    Notons la notion de responsabilité à base de faute, le contrat type, la notion de responsabilités objective, celle de la propriété du véhicule... toutes des considérations amenées à évoluer.

    Quant aux opportunités amenées par ces ruptures technologiques, Vincent Pécasse y voit, pour l’assureur, la possibilité de développer de nouveaux services, allant bien au-delà de la « simple assurance du véhicule ». Le métier de l’assureur sera, demain, de faciliter une mobilité améliorée.

    Mais pour arriver à opérer ce virage, il évoque la nécessité d’un bon change management. Il faudra en effet donner envie de s’investir dans ces nouveaux business au service d’une autre conception de la liberté de se mouvoir !

    Enfin, Pierre Courbe, Chargé de Mission Mobilité chez Inter-Environnement Wallonie, a abordé la question de la conduite autonome sous ses implications environnementales.

    Partant du constat que le transport représente un des plus gros émetteur de CO2, il a illustré dans quelles conditions, selon lui, la voiture autonome pourrait faire partie des solutions acceptables pour une mobilité plus durable. Le meilleur scénario étant, pour lui, celui où la voiture autonome est complémentaire et intégrées aux services de transports publics.

    Le pire des scenarios ? Celui où chacun a sa propre voiture autonome, bien entendu ! Car ne nous leurrons pas, il plane sur la voiture autonome pas mal de zones d’ombre en termes d’impacts environnementaux (la consommation en énergie due aux émissions du data processing et la question du matériel électronique embarqué, notamment).

    Comme Vincent Pécasse, il a attiré l’attention sur la complexité de la sécurité durant la période transitoire (celle où voitures autonomes et conducteurs humaines utiliseront ensemble la voie publique). Et d’interroger plus fondamentalement ce qui est souhaitable : veut-on vraiment que le pouvoir public investisse autant pour de nouvelles infrastructures adaptées ? Car les montants à investir s’annoncent énormes.

    Cette question des infrastructures a à nouveau été débattue lors de la séance des Q/R avec les participants, dans un contexte post-inondations précisément… Aubaine ou surcharge financière ?

    La séance aura été riche en partage de points de vue sur un sujet qui, comme toute rupture, amène son lot de levée de boucliers et d’opportunités.


    Le livre blanc « Future move » est désormais disponible ici.

    Retrouvez les autres conférences du cycle :

    Retrouvez ci-dessous les présentations du Professeur Pierre Duysinx, Vincent Pécasse (Ethias) et Pierre Courbe (Inter-Environnement Wallonie), ainsi que la captation vidéo.

    La conduite autonome et la mobilité en tant que service. Les défis de l’industrie automobile | LIEGE CREATIVE, 13.10.2021 from LIEGE CREATIVE

     

     

    Comme de nombreux autres secteurs, l’industrie automobile est confrontée à une transformation radicale. Electrification, conduite autonome, mobilité partagée, connectivité, Internet of Things, Industrie 4.0, Big Data, intelligence artificielle, blockchain, Digital Twins…

    Les développements technologiques mais aussi les comportements des utilisateurs et la demande d’une mobilité durable amènent l’industrie automobile à un point de basculement.

    La crise du Covid-19 n’a fait qu’accentuer, encore, ces évolutions en questionnant en profondeur, notamment, notre rapport à la mobilité.

    C’est dans ce contexte et dans le cadre du projet européen PAE que voit le jour Le livre blanc « FUTURE MOVE » est désormais disponible ici réalisé par l'Université de Liège. Celui-ci donne un aperçu de la façon dont l’industrie automobile peut ou doit évoluer sous la pression conjointe des différents éléments qui la positionnent sur un chemin de rupture.

    Cette rencontre-conférence, qui réunira un panel d’intervenants aux compétences variées, sera l’occasion, sur base des constats du livre blanc «  FUTURE MOVE », de partager les mégatendances et innovations de l’industrie automobile, tout en pointant les défis d’ordre technologique et sociétal auxquels le secteur doit faire face.

    Le focus sera particulièrement mis, dans le cadre de cette soirée, sur la conduite autonome et la mobilité en tant que service et leurs implications multiples.

    Programme

    17h30 : Accueil
    18h00 : Début de la rencontre-conférence
    19h30 : Séance de questions-réponses
    20h00 : Cocktail dinatoire


    Suivant les mesures actuellement en vigueur, le Covid Safe Ticket sera requis pour participer à toute rencontre-conférence LIEGE CREATIVE.
    Plus d’info sur le protocole sanitaire d'accès à nos rencontres-conférences


    Avec le soutien de :

    Les partenaires du projet Pôle Automobile Européen :